Electric Ladyland

Boudé par une partie des Etats-Unis, son propre pays natal, Jimi Hendrix atterrit à Heathrow le 24 septembre 1966 et voit en Londres la Terre Promise qui lui permettra de prendre son envol. Il ne se trompera pas. Il commence tout d’abord par provoquer en duel celui que tout le peuple anglais a adoubé comme le souverain de la six cordes, Eric Clapton, fraîchement divorcé des Bluesbreakers. A l’heure où les graffitis ‘Clapton is God’ fleurissent un peu partout dans le tube londonien, Slowhand vient de monter l’un des premiers super groupe de l’histoire, Cream, autour de Ginger Baker et Jack Bruce. Le samedi 1er octobre, au Regent Polytechnic, Jimi ne boude pas son plaisir en exécutant un Killing Floor (Howlin’ Wolf) sidéral et sidérant qui laisse Clapton catatonique. Ce dernier, livide, quitte la scène discrètement pour rentrer chez lui en taxi. La passation de pouvoir a lieu ce soir d’automne, le Voodoo Child coupable de déicide.

Il aura fallu moins d’une saison à Jimmy James (son ancien pseudonyme avec The Blue Flames) pour conquérir la Grande-Bretagne qui représentait en 1966 la nouvelle vague de la musique blues. Il monte avec l’aide de son producteur Chas Chandler le Jimi Hendrix Experience avec Noel Redding des Animals à la basse et Mitch Mitchell (qui gagna sa place à pile ou face contre Aynsley Dunbar) le batteur de Georgie Fame. Le trio gagne aussi le cœur des foules en plaçant coup sur coup les hits Hey Joe, Purple Haze et The Wind Cries Mary, les deux derniers étant les premières compositions de Hendrix et précédant leur premier LP Are You Experienced. L’Experience se paye même le luxe d’entrer dans les bonnes grâces des monarques Beatles, poussant McCartney a suggéré le groupe aux organisateurs du festival pop de Monterey qui doit se tenir du 16 au 18 juin 1967 en Californie. C’est auréolé de leur popularité britannique et introduit par Brian Jones en maître de cérémonie qu’ils font définitivement plier le peuple américain.

Electric Jimi Land :

Jimi Hendrix gardera toujours Londres dans un coin de son cœur et témoignera de sa reconnaissance en multipliant les voyages entre les Etats-Unis et l’Angleterre. Après l’enregistrement du second LP Axis : Bold as Love aux Studios Olympic, l’entreprise Hendrix décide de revenir à New York et de s’installer au flambant neuf Record Plant Studio sur les conseils de Tom Wilson, qui a notamment travaillé avec Dylan, Zappa et Simon & Garfunkel. Outre la peinture encore fraîche, Hendrix est conquis par le matériel à la pointe de la technologie que lui fournit ce nouveau sanctuaire dont un enregistreur 16 pistes et une console 24 voies, les premiers de l’histoire. Il s’y installe début avril 1968, alors qu’au même moment, Soft Machine enregistre son premier LP The Soft Machine en seulement quatre jours. De ces sessions parfois chaotiques mais transfigurées par le génie de Hendrix et par toute sa méticulosité d’orfèvre va déboucher l’album le plus abouti et le dernier de l’Experience.

L’un des premiers morceaux travaillés se trouve être le dystopique 1983… (A Mermand I Should Turn to Be), gravé le 22 avril avec Chris Wood de Traffic à la flûte. Le courant passe immédiatement entre Hendrix et l’ingénieur du son présent, Eddie Kramer, qui voit son statut pérennisé pour le reste des enregistrements. Noël Redding absent, Hendrix tient la basse et ne la lâchera plus de l’album. Les tensions déjà présentes prennent des proportions catastrophiques entre les deux hommes et Redding sera évincé sur la plupart des titres. Mais c’est le producteur Chas Chandler qui est le premier à en faire les frais. Lassé du perfectionnisme excessif de Hendrix il jette l’éponge lors des sessions sur Gypsy Eyes (qui aura nécessité une cinquantaine de prises), le laissant seul aux commandes. Le guitariste se voit libérer du carcan cadenassé de Chandler qui prônait le traditionnel format musical des chansons de trois minutes. Il va alors pouvoir laisser exulter son talent sans aucune limite, les sessions partant dans de longues jams interminables.

Hendrix commence par faire sauter la clause de confidentialité qui régit habituellement la conception d’un nouvel album. L’Experience avait pour habitude de flâner la nuit dans les clubs de New York et jouer avec tous les groupes ou musiciens qu’ils croisaient. Hendrix ramène un soir du club The Scene sur Manhattan une vingtaine de convives (ce qui avait le don de rendre Redding fou furieux) dont Steve Winwood de Traffic et Jack Casady de Jefferson Airplane. C’est au petit matin du 2 mai, dans ce maelstrom sonore et en seulement trois prises directes, que naquit Voodoo Chile. Hendrix devient l’enfant vaudou. Les quinze minutes comprennent en bruit de fond les détails de ces orgies de studio, les invités discutent et applaudissent, les verres s’entrechoquent, ce qui ajoute à l’atmosphère live de night-club. Le groupe revient le lendemain pour être filmé dans le cadre d’un court documentaire pour ABC. Au lieu de reprendre le morceau de la veille, ils gardent les grandes lignes pour improviser sans aucune note devant les caméras le morceau qui va façonner la légende de guitar hero de Hendrix, Voodoo Chile (Slight Return).

Certaines pistes furent dépoussiérées de l’année précédente pour être incluses au matériel comme l’ancien single Burning of the Midnight Lamp (6 et 7 juillet 1967 au New York’s Mayfair Studio) ou Crosstown Traffic (20 et 21 décembre 1967 aux Olympic). Mais c’est un autre titre, qui n’appartient à aucun membre du groupe, qui va exploser tous les charts et passer à la postérité. Tout d’abord simple maquette de travail entamée au Studio Olympic le 21 janvier 1968, après que le manager de Dylan, Albert Grossman, lui ait fait passer une démo, All Along the Watchtower est reprise à New York au début du mois de juin. La compo du ‘Zimm’ provient de son LP John Wesley Harding paru en décembre dernier. Durant les sessions, un énième différent éclate entre Jimi et Noel Redding, ce dernier laissant tomber le travail sur ce morceau. C’est Hendrix qui tient donc la basse et toutes les parties guitare avec Dave Mason, un autre membre de Traffic. Le multi-instrumentiste Brian Jones, ne ratant pas une occasion de s’évader de l’enfer qu’il vit avec les Stones, est lui aussi de la partie. Il s’occupe de toutes les percussions sur le morceau ainsi que la ligne de piano qui sera incluse au mix final. Les différentes prises se prolongent tout l’été au Record Plant, passant d’un traditionnel quatre pistes au monstrueux seize pistes, ajoutant de nombreux overdubbs et pistes de guitare au résultat. La version définitive sort en single le 21 septembre, un mois avant Electric Ladyland, et atteint la vingtième place au Billboard, devenant le plus gros succès commercial du vivant de Hendrix.

Acid Turkish Bath :

Hendrix avait une idée bien arrêtée sur ce que devait être la pochette de son Electric Ladyland. Mais malgré ses velléités, il ne fut pas entendu par ses maisons de disques britanniques et américaines. Jimi souhaitait une photographie de Linda Eastman, future Mme McCartney, une habituée du Scene Club et de l’underground new-yorkais avec qui il s’entendait (plus que) bien et qui avait déjà tiré le portrait aux noms les plus ronflants du rock. Le cliché désiré représentait le groupe, entouré d’une tribu de gamins, assis devant une sculpture d’Alice au pays des merveilles en plein Central Park.

Trop occupé à sillonner les routes du pays et à régler les problèmes internes au Jimi Hendrix Experience, le natif de Seattle écrivit ces mots au patron de Reprise Records :

« Monsieur,

Voici les dessins que nous souhaiterions voir apparaître sur la pochette du LP. De préférence sur le devant et sur l’arrière. Sans les cadres blancs autour de celles en noir et blanc. Et avec la plupart d’entre elles mises l’une à côté de l’autre et mélangées avec la couleur de fond de la pochette à différents endroits.

Merci d’utiliser la photo en couleurs de nous avec les enfants sur la statue pour les photos extérieurs de la pochette (sur le devant ou sur l’arrière) ainsi qu’une autre pour l’autre côté. Merci d’utiliser trois photos de nous de qualité pour cette pochette. En noir et blanc ou en couleur.

Nous voudrions nous excuser d’avoir mis autant de temps à vous envoyer tout cela mais nous avons travaillé très dur pour les concerts et l’enregistrement de l’album. S’il vous plait, pourriez-vous trouver un endroit sur la pochette de face pour écrire : « Letter to the room full of mirrors » (...)

Merci de respecter ces consignes car tout changement serait inapproprié vis-à-vis de la musique du disque et des performances live du groupe - et la musique est ce qu’il y a de plus important. En plus, nous avons assez de problèmes personnels pour en plus avoir à nous soucier de la bonne réalisation de cette pochette.

Merci,

Jimi Hendrix »

Pas très clair et précis dans ses propos, la décision fut prise sur le continent américain que la pochette représenterait un portait rouge et jaune de Hendrix, pris par Karl Ferris au Saville Theatre de Londres.

Track Records, la maison de disque britannique, alla plus loin encore. Elle prit le libre arbitre d’imprimer une photographie de David Montgomery représentant dix-neuf jeunes filles entièrement dénudées. Allongées devant un fond noir, certaines d’entre elles tiennent en leurs seins les précédents LP de l’Experience et un portrait de Hendrix. L’oeuvre s’inspire délibérément d’une peinture à l’huile orientaliste de Jean-Auguste-Dominique Ingres, artiste français du XIXème siècle. Peint en 1862, Le bain turc montre une scène ordinaire des hammams, très provocatrice, où l’on retrouve la muse de sa précédente peinture La baigneuse Valpinçon (1808).

Hendrix manifesta sa gêne et son mécontentement à la publication de cette édition. La pochette ne mit pas longtemps à être censurée.

Certains disquaires choqués et jugeant le LP ‘pornographique’ décidèrent de le retirer purement de leurs bacs. D’autres plus malins et peu chauds à faire une croix sur les ventes du dernier Hendrix, la recouvrirent d’un emballage marron. Couvrez ce sein, que je saurais voir. 

Les avis de la presse à l’époque :

« Étant un peu lassé de la musique en tant que ‘bruit réactif’, je n’étais pas très pressé de creuser ce LP, mais je devais le faire. Hendrix est un excellent musicien et ses concepts de science-fiction surmontent le bruit. Il n’y a pas vraiment de concept ici (pas de truc à la Sgt. Pepper’s), il y a une unité, un flux d’énergie. Le LP s’ouvre avec une piste électronique à l’aide de boucles de bande et de mise en phase (pensez à Itchy Coo Park par les Small Faces pour un exemple de mise en phase) appelé And the Gods Made Love. Hendrix a déclaré lors d’une interview : « Nous savions que c’était la piste sur laquelle les gens se précipiteraient pour critiquer, alors je l’ai mise en premier pour que ça soit réglé. »

Le « je » dans cette phrase est clair et sans ambiguïté. Hendrix a produit et dirigé l’album lui-même. S’en suit Electric Ladyland, qui donne son nom au LP, un voyage de conte de fées qui sert d’introduction au reste de l’album. « I want to show you the angels spread their wings. » (« Je veux vous montrer les anges déployer leurs ailes. ») Ensuite Crosstown Traffic, un gros coup de pied dans la fourmilière, avec un jeu de batterie lourd et gras. « 90 miles an hour is the speed I drive, girl. » (« 150 km/h est ma vitesse de croisière, chérie ») chante Hendrix alors qu’il compare la femme à un embouteillage. «It’s so hard to get through you. » (« C’est si difficile de te pénétrer. »)

Puis un break, qui semble avoir été enregistré tard dans la nuit au fond d’un petit club sombre et enfumé, à l’un de ces bœufs que Jimi affectionne tant. Il comporte Stevie Winwood aux claviers et Jack Cassady à la basse et porte le nom de Voodoo Chile. Il commence par une introduction à la guitare dans le style John Lee Hooker, et garde cette tonalité blues tout du long, bien que les paroles de Hendrix (« My arrows are made of desire, From as far away as Jupiter’s sulphur mines » - « Mes flèches sont faites de désir, venues d’aussi loin que les mines de souffre de Jupiter ») sont bien loin de Rollin’ Stone (la chanson de Muddy Waters qui est l’ancêtre de cette piste, parmi tant d’autres). Après un final en apothéose ponctué de cris et d’applaudissements venus du public, un spectateur crie « Turn that damn guitar down » (« Coupez cette putain de guitare ») et la piste se conclue avec Hendrix et une groupie réalisant que le bar va fermer. « The bar is closed ? » s’interroge-t-elle avec surprise. Et oui, il l’est.

La face B s’ouvre avec une composition du bassiste Noel Redding, Little Miss Strange, probablement le morceau le plus commercial du lot. Fondamentalement très hard rock, la meilleure chose à son sujet est une parfaite unisson des lignes de guitare, probablement un overdub, à moins que Hendrix ait joué plusieurs phrasés. La piste qui suit, Long Hot Summer Nights, est dans la veine de Visions of Johanna (Bob Dylan, Blonde on Blonde), bien que Jimi détienne sa propre conclusion (« My baby’s coming to rescue me »). Une reprise de Earl King, Come On, s’ensuit. Très rock et soul, le break de guitare au milieu du morceau est l’une des plus belles choses que Hendrix ait jamais faites. Gipsy Eyes débute avec un roulement de batterie, une simple ligne de basse avant que la guitare convaincante et acérée ne fasse son apparition. C’est une mélodie légère et entêtante qui vous reste graver dans un coin de votre tête. (S’il était possible de siffler du Hendrix, ce serait sûrement le morceau le plus approprié.) La face se termine avec Burning of the Midnight Lamp qui fut le dernier single de Hendrix en Angleterre, publié il y a un an cet été. C’est une ballade freaky, avec aucun texte digne de ce nom, dans l’ensemble une purge. Ça ne mène nulle part.

La face C est la face maritime ou aquatique. Elle s’ouvre avec Rainy Day, Dream Away mené par un petit groupe qui comprend Buddy Miles à la batterie. Hendrix s’applique beaucoup pour restituer fièrement la monotonie des jours pluvieux, jusqu’alors bâcler dans de nombreuses chansons. Cela nous amène à 1983 : A Merman I Should Be (un merman est un pote de sirène –mermaid- bien sûr). La vision apocalyptique de l’avenir par Hendrix nous montre un monde déchiré par la guerre, au bord de la destruction, alors que lui et sa dulcinée se promène sur le bord de mer, et rêve de vivre sous l’eau. Avec des boucles de bande, une guitare mélancolique et la flûte de Chris Wood (également de Traffic), Hendrix structure une belle ambiance sous-marine. Pour seulement crever cette bulle aquatique à violent coup de riff. Ma première réaction a été, pourquoi a-t-il fait ça ? J’ai ensuite réalisé qu’il avait alors érigé une merveille, mais dans une crise de foi, l’avait violemment saccagé dans l’urgence avant que quelqu’un d’autre ne puisse le faire. Une autre piste électronique, Moon Turn the Tide Gently Gently Away, vous vide clairement la tête et la face se termine paisiblement.

La face D s’ouvre avec la suite de Rainy Day, seulement plus lourd et plus funk, peut-être un peu trop. House Burning Down pourrait être considéré comme la première déclaration de conscience sociale de la part de Hendrix. Mais il se termine par un vers surréaliste typiquement Hendrix : ‘An eerie man from space, come down and take the dead away.’(‘Un homme étrange de l’espace, descends et fais disparaître les morts.’). Ensuite vient le nouveau single All Along the Watchtower de Dylan, à bien des égards, une des pistes les plus intéressantes ici. Bien souvent chez Hendrix, il est difficile d’appréhender la structure dès la première écoute. Le rythme commence et s’arrête, les changements sont un peu difficiles à suivre parfois. Mais ici, si vous écoutez la piste de la guitare rythmique, et gardez la chanson originale en tête, vous pouvez voir la façon dont Hendrix recouvre de sa magnifique patte de velours le côté déjà classique du morceau. Il est fidèle à son humeur et illustre parfaitement le vers ‘The wind began to howl’. Enfin vient Voodoo Child (Slight Return), monté cette fois avec l’aide de tous ses musiciens de studio, plus lourd et suave, mais aussi plus direct et concis.

En d’autres termes, une analyse profonde et introspective de ce qui se passe dans la tête de Hendrix, et pour le coup de belles choses. Quelques bribes d’idées pour résumer : Hendrix est le Robert Johnson des sixties, le Johnson version électrifié. Rappelez-vous qu’il a usé de la pédale wah-wah avant Tales of Brave Ulysses (Cream) et il est toujours le patron. Et il est agréable de constater qu’il est suffisamment confiant pour jouer à nouveau du blues. Et j’aimerais en entendre davantage.

Hendrix super star psychédélique ? Ou tout simplement un bon musicien/ producteur ? Tout dépend si vous voulez croire vos yeux ou vos oreilles. Et si vous voulez explorer, faite-le au casque et écoutez le bruit de va-et-vient de la guitare dans votre tête. Hendrix est incroyable et j’espère qu’il rentrera dans la postérité. S’il maintient ce niveau, ça ne fait aucun doute. »

Tony Glover, Rolling Stone, 9 novembre 1968

Anec-doses :

- Il était courant que Hendrix rentre au studio dans la nuit accompagné d’une dizaine d’invités ramassés lors de ses pérégrinations. Amis, groupies, zonards venaient participer à d’interminables ‘jam sessions’, autour d’un Jimi amusé et clairement défoncé. Un jour, se rendant à un enregistrement en taxi, le chauffeur l’interroge : «  C’est toi Hendrix ? » lui précisant qu’il est joueur de congas à ses heures perdues. Il n’en faut pas plus pour que le guitariste l’invite en studio et c’est lui qui joue des percussions sur Rainy Day, Dream Away et Still Raining, Still Dreaming.

- A propos de la reprise de sa composition All Along the Watchtower, Bob Dylan déclara, lui pourtant si avare en déclarations et compliments : « J’ai aimé la version de Jimi Hendrix et depuis sa mort, je la joue à sa façon… C’est étrange comme quand je la chante, j’ai l’impression que c’est toujours un hommage à lui, en quelque sorte. »

- C’est après un passage par New York à la fin de l’année 67 et des retrouvailles avec son ancien comparse Curtis Knight que Hendrix découvrit un nouveau gadget, la pédale wah-wah. Il avait déjà eu l’occasion de voir un groupe californien des plus étranges s’en servir, The Mother of Invention. Cet accessoire, dont il fait abondamment usage sur Electric Ladyland, ne le quittera plus jusqu’à la fin de sa carrière, en studio ou sur scène.

- Avant de ‘détruire psychologiquement’ Eric Clapton ce fameux soir au Regent Polytechnic, Hendrix avait déjà accroché le scalp d’un autre illustre guitariste plus tôt dans l’année. Mike Bloomfield du Paul Butterfield Blues Band était considéré comme le meilleur guitariste de la côte est et résidait à Greenwich Village, tout comme Jimi qui venait de signer avec John Hammond. Lorsque Bloomfield décide d’aller dans le club où joue ce phénomène dont tout le monde parle, ce dernier le reconnait et déballe l’intégralité de son potentiel : « Ce jour-là il m’a désintégré, c’était la totale. Des bombes H dégringolaient, des missiles téléguidés volaient dans tous les coins, je ne te raconte pas les sons qui sortaient de sa guitare. Tous les sons que je devais l'entendre reproduire plus tard, il les a faits, dans cette pièce, avec une Strat, un Twin, une Maestro Fuzz-Tone, et c'est tout. Il jouait à un volume très poussé. J'aurais aimé comprendre comment il faisait tout ça. Il m'a ébloui avec sa guitare et, pendant l'année qui a suivi, j'ai à peine touché la mienne. J'étais intimidé. Je n'avais jamais rien entendu de tel. »

- Le 4 janvier 1968, Hendrix est arrêté par la police suédoise à Stockholm. Il consommait depuis quelques temps du LSD en quantité suffisante pour inquiéter même ses peu abstinents collègues mais, en cette occasion, il y avait ajouté assez d’alcool pour être salement bourré. Saisi d’un accès de folie furieuse, il s’était mis à détruire le mobilier de sa chambre d’hôtel, jusqu’à ce que Noel Redding et Gerry Stickells, un roadie, parviennent à le maîtriser. Après quoi il fut conduit menottes aux mains en prison, où il se réveilla le lendemain matin, tout confus et sans le moindre souvenir de ce qu’il s’était passé la veille.

- Hendrix ne se séparait jamais de son magnétophone à cassettes Sony lors de ses virées nocturnes new-yorkaises et enregistrait ses concerts improvisés dans les clubs de la ville. De rares copies existent où Jimi peut être entendu jouer avec B.B. King, Johnny Winter, Paul Butterfield Blues Band, Buddy Miles ou Al Kooper. Mais une de ces collaborations spontanées est des plus troublantes. Une nuit de juin, au Scene Club qu’il fréquentait régulièrement, c’est avec un Jim Morrison plus qu’éméché qu’il se retrouva. Le titre Morrison’s Lament qui dure un peu plus de huit minutes laisse deviner l’état de fraîcheur du chanteur des Doors, qui vocifère plus qu’il ne chante, avant de s’effondrer dans les amplis derrière la scène.

Sources :

www.jimihendrix.com/

www.rollingstone.com/

Dave Whitehill – Hendrix : Electric Ladyland (1989) Hal Leonard

David Moskowitz – The words and music of Jimi Hendrix (2010) Praeger

John Perry – Jimi Hendrix’s Electric Ladyland (2004) Bloomsburry Publishing

David Stubbs – Jimi Hendrix, The stories behind every song (2003) Da Capo Press

Mai 2017.

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