Baby Love

La femme est l’avenir de l’homme’ chantait Jean Ferrat, reprenant alors la fameuse maxime de Louis Aragon dans son recueil de poèmes Le fou d’Elsa. Le chanteur engagé énonce alors une vérité universelle. Le sexe féminin a toujours été une source d’inspiration inépuisable pour l’artiste en mal de création. La femme devient alors muse, antonomase devenue célèbre, piochée dans la mythologie grecque et correspondante aux neuf filles de Zeus et Mnémosyne. Chacune excellant dans son art, son domaine de prédilection. Le nom ‘muse’ provient du grec ‘Mousa’ ainsi que du latin ‘Mos, moris’qui peut être traduit par ‘mœurs’ ou ‘ce qu’il convient de faire’. La muse, donc la femme auprès de l’artiste, lui indique la marche à suivre, ce qui doit être réalisé. Et comment parvenir à l’aboutissement de son travail, la concrétisation de son œuvre. Elles furent nombreuses, depuis la nuit des temps, à se tenir aux côtés d’écrivains, penseurs, philosophes, peintres ou sculpteurs. Elles furent tout autant à prendre place dans la vie des étoiles du rock. Depuis le tout début.

Comment ne pas commencer par le King ? Adulé par des millions de jeunes filles hystériques, faisant pleurer et hurler dans les concerts comme dans les chaumières, Elvis a vu naître le premier fan club de jouvencelles amourachées, bien avant les Beatles. Virevoltant et excentrique sur scène, Presley est un éternel introverti dès lors que les projecteurs s’éteignent. Et la vie sentimentale du sex-symbol planétaire est tout aussi terne. C’est lors de son service militaire à Bad Nauheim en Allemagne qu’il rencontrera sa future épouse Priscilla Beaulieu, de presque dix ans sa cadette. Elvis vient de perdre son plus grand repère et probablement son plus grand amour, sa mère. Soucieux de ne pas voir sa star sombrer dans la dépression, c’est par l’intermédiaire de Currie Grant un ami de la caserne que la rencontre sera orchestrée. Car tout l’entourage, des parents de Priscilla (qui souffle tout juste ses quatorze printemps) au microcosme gravitant autour du King, planifie l’évènement comme un conseil de guerre. La principale intéressée est elle-même briefée sur l’attitude à adopter, la gestuelle, l’élocution et les sujets à ne pas aborder. En 1960, Elvis achève son service et rentre aux Etats-Unis. Il faudra deux ans de tractation pour qu’il parvienne à attirer Priscilla à Graceland, son repaire de Memphis. Mais c’est une prison dorée qui l’attend, cloitrée tout le jour à l’abri des paparazzis et des curieux, dans l’attente que le King revienne de tournée, épiant de loin les infidélités de son compagnon.

C’est le 1er mai 1967 qu’elle sort enfin de l’anonymat lorsqu’ils se marient à Las Vegas. Elle donne naissance l’année suivante à leur fille Lisa Marie qu’Elvis idolâtre, délaissant rapidement la jeune mariée. Le couple qui s’est installé dans un ranch à côté de Graceland bat rapidement de l’aile et les shows récurrents de Presley à Las Vegas le tient éloigner de sa vie familiale. Priscilla commence à fréquenter son professeur de karaté et finit par demander le divorce qui est prononcé le 9 octobre 1973. Elvis ne s’en remettra jamais tandis que Priscilla débutera sa nouvelle vie en ouvrant une boutique de vêtements à Santa Monica avant de se lancer dans le cinéma dans les années quatre-vingt. Elle partagera aussi la vie de John Travolta et Julio Iglesias. Quant à sa fille, Lisa Marie, son union avec Michael Jackson sera aussi retentissante que le mariage de ses parents.

Morceaux relatifs : Separate Ways, Always on My Mind.

Une autre hit-girl avait gravité dans l’entourage du King bien avant Priscilla. Dans l’euphorie des années cinquante, nombreuses sont les prétendantes à une place sur le trône. Parmi elles figure Sharon Sheeley, sweet little sixteen aux dents longues mais surtout au talent d’auteur-compositeur précieux et recherché à une époque où les interprètes ne sont pas toujours les créateurs de leurs œuvres. Après avoir travaillé avec Ricky Nelson (pour qui elle écrira Poor Little Fool qui finira numéro 1), puis les Everly Brothers, c’est dans la chambre d’hôtel de Don Everly qu’elle fait la rencontre du plus beau garçon qu’elle n’ait jamais vu selon ses souvenirs. Un jeune gaillard au visage poupon qui ne lui porte aucune attention, passant son temps à dégainer et rengainer un colt de collection qu’il vient d’acquérir : Eddie Cochran. Tous les possesseurs de ses disques se sont déjà rendu compte que la plupart de ses morceaux étaient signés à deux mains Cochran/Sheeley. Elle a d’ailleurs écrit Love Again et Cherished Memories pour ses beaux yeux qu’elle met plusieurs mois à décrocher. Cochran, dans la veine du pur rocker machiste et viril, ne traite pas toujours sa Shirley de la meilleure des manières et préfère garder son indépendance et la liberté que lui confère le célibat. Leur relation reste donc officieuse jusqu’à Noël 1959. Avec elle, il va cosigner quelques-uns de ses plus grands classiques.

Eddie portait une grande affection pour Buddy Holly, les deux s’étant côtoyés si souvent lors des tournées d’hiver et des festivals sur les campus universitaires. Il fut donc normalement bouleversé à la mort de ce dernier, surtout que c’est lui qui avait invité Holly à participer à la tournée Winter Dance Party ’59. Mais sa maison de disque Liberty le rappelle la veille du premier concert, un passage au Ed Sullivan Show venant d’être négocié. Il se sentira éternellement coupable. Après la tragédie du crash aérien, Cochran refuse catégoriquement que Liberty commercialise le single Three Stars, ne voulant pas faire d’argent sur la mort de ses amis. Une première dispute éclate, suivie d’une seconde avec son agent Jerry Capehart lorsque Eddie refuse finalement de se produire au Ed Sullivan. Alors quand Gene Vincent lui propose de l’accompagner en Grande-Bretagne, il se précipite sur l’occasion de s’éloigner un temps des Etats-Unis. L’interprète de Be-Bop-A-Lula regrettera toute sa vie son invitation.

Parti sans Shirley qu’il rechigne à emmener avec lui en tournée pour pouvoir mieux s’éclater avec ses copains, cette dernière finit tout de même par le rejoindre en Angleterre. Eddie lui promet même de l’épouser à leur retour. La suite appartient à l’histoire lorsque les trois américains (avec Gene Vincent) s’engouffrent dans un taxi le 16 avril 1960. Si Vincent boitera le restant de ses jours, Shirley est durement touchée au bassin et les médecins lui prédisent qu’elle ne marchera plus jamais. Elle mettra de longs mois à récupérer. Après s’être mariée l’année suivante avec le présentateur Jimmy O’Neil, elle disparait doucement de la circulation. Une hémorragie cérébrale l’emporte en 2002, à 62 ans, et il faudra attendre 2010 pour voir son autobiographie publiée Summertime Blues : A Rock ‘n’ Roll Adventure.

Morceaux relatifs : Somethin’ Else, Lonely.

Buddy Holly, qui se tua moins d’un an avant son ami Cochran, venait tout juste d’épouser Maria Elena Santiago, une portoricaine exilée à New York. A la mort de sa mère, son père l‘envoya de San Juan à la Grosse Pomme chez sa tante Provi Garcia. Elle travaillait comme réceptionniste chez la maison d’édition Peer-Southern Music lorsqu’elle rencontra Buddy en juin 1958. Il venait tout juste de se séparer des Crickets et débutait sa nouvelle vie d’artiste solo. Ce dernier ne se fit pas prier pour la rencarder après avoir demandé, sous insistance de Maria, la permission à sa tante. Dès leur premier rendez-vous, il la demanda en mariage après un dîner chez P.J. Clarke. La cérémonie eut lieu deux mois plus tard, le 15 août 1958, à Lubbock dans le Texas, la ville natale de Holly. Puis le couple partit en lune de miel à Acapulco. Ils retournèrent ensuite s’installer à New York. Maria Elena eut l’occasion d’accompagner son mari une seule fois, en octobre, assurant la vente de produits dérivés en marge des concerts. Lorsque Holly partit pour ce qui serait sa dernière tournée, sa femme resta à quai, alors enceinte de quelques semaines. Elle apprit la nouvelle de la mort de son mari par la télévision et fit une fausse couche peu après. Elle regretta toujours amèrement de ne pas avoir été auprès de Holly, arguant qu’elle ne l’aurait jamais laissé monter dans l’avion par cette tempête.

Maria Elena Santiago-Holly se remaria et eut trois enfants, passant la majeure partie de sa vie à protéger l’héritage de son premier époux. Domiciliée à Dallas au Texas, elle ouvrit en 2010 une école de musique, la Buddy Holly Educational Foundation, avec l’aide de Peter Bradley.

Morceaux relatifs : Crying, Waiting, Hoping et Peggy Sue Got Married.

Une autre figure rock ‘n’ roll des fifties défraya la chronique, créant l’un des plus gros scandales people de ces années. Jerry Lee Lewis tient, depuis ses débuts en 1956, le même statut sulfureux que son compère Elvis au sein d’une Amérique puritaine pas préparée à de tels trublions. Si ses disques sont censurés des antennes radio, le Killer se rattrape en concert où ses performances endiablées lui valent d’être considéré comme bon à interner. Jerry joue du piano avec les pieds, les coudes… et même les fesses, quand il ne décide pas purement et simplement de l’incendier avec une bouteille d’essence. Dix ans avant Hendrix ! Propulsé en haut des charts avec ses deux hits Great Balls of Fire et Whole Lotta Shakin’ Goin on, la carrière de Lewis est au firmament. Une tournée européenne est même programmée, une première pour un artiste rock américain dont aucun n’est encore sorti du territoire. Lewis doit commencer par la Grande Bretagne et atterrit à Heathrow au printemps 1958. Lorsqu’il descend de l’avion, une jeune poupée brune, qu’il vient d’épouser, est agrippée à son bras. Bien trop jeune. C’est le journaliste Ray Berry, le seul présent à son arrivée, qui apprend la nouvelle et vend la mèche qui mettra le feu aux poudres. Elle s’appelle Myra Gale Brown, est la fille du cousin de Lewis et est âgée de treize ans ! La légende raconte même qu’elle croyait encore au Père Noël. Tout le clan du Killer (qui vient quant à lui de souffler ses 22 bougies) se défendra qu’elle va sur ses seize printemps. Mais il est trop tard et la nouvelle fait l’effet d’une bombe, surtout aux Etats-Unis où tout le monde pointe du doigt le côté pédophile et consanguin de la chose. Cerise sur le gâteau, Lewis a « oublié » de divorcer de sa précédente épouse, son second mariage. A son retour au bercail, il est cloué au pilori. Il passe de soirées à 10.000$ à des petits clubs miteux où il touche à peine 250$. Banni des ondes, des plateaux télé et lâché par la majorité de son entourage, le Killer débute une longue et interminable traversée du désert. La nouvelle vague anglaise lui rendra de nombreux hommages durant les deux décennies suivantes mais le train du rock ‘n’ roll est déjà passé. Et la carrière de Jerry Lee Lewis est d’ores et déjà derrière lui.

Morceaux relatifs : Sweet Little Sixteen, High School Confidential

Compositeur travaillant aux côtés de Phil Spektor au début des années 1960, Salvatore Philip Bono, alias Sonny, fait la connaissance de Cherilyn Sarkasian, dite Cher, en novembre 1962 dans un café de Los Angeles. D’abord choriste chez Spector (elle fait les chœurs sur Be My Baby des Ronettes), leur coup de foudre donne lieu au duo pop Caesar & Cleo, rebaptisé en 1964 Sonny & Cher. Le couple explose peu de temps après avec le tube planétaire I Got You Babe. Sonny, qui compose la majorité des morceaux du tandem, voit plusieurs de ses œuvres devenir cultes entre les mains d’autres artistes comme Bang Bang (My Baby Shot Me Down) par Nancy Sinatra en 1966 ou She Said Yeah par les Rolling Stones en 1965. Les deux artistes sortent plusieurs numéros un durant les sixties et font même des apparitions sur grand écran (Wild on the Beach, Good Times) avant de donner naissance à une fille Chastity Sun Bono le 4 mars 1969. La petite famille, à l’instar des Nelson, eurent leur show télévisé sur CBS The Sonny & Cher Comedy Hour de 1971 à 1974. Le duo éclate définitivement en 1977 après leur divorce. Cher continuera une carrière solo tandis que Sonny Bono se lancera dans la politique jusqu’à sa mort dans un accident de ski en 1998.

Morceaux relatifs : I Got You Babe, The Beat Goes on.

Tina Turner débute sa carrière en 1960 aux côtés de son mari Ike Turner, avec le single A Fool in Love. Ensemble, ils survoleront la décennie avec le tube River Deep, Mountain High, produit par Phil Spektor, et leur reprise du Creedence Clearwater Revival, Proud Mary. Alcool, cocaïne et violences conjugales auront raison du couple soul, qui se sépare en 1976, après avoir eu deux enfants ensemble. L'histoire retiendra surtout la carrière solo de Tina Turner (plus de 180 millions d’albums vendus) qui explose dans les années 80, la consacrant « reine du rock ‘n’ roll ». Elle ouvre alors régulièrement les shows des Rolling Stones ou de Rod Stewart et entre même dans le Guinness Records pour son concert au Maracana le 16 janvier 1988 qui attira quelques 180.000 personnes. Son ex-mari, quant à lui, ne renouera pas avec le succès, enchaînant les condamnations et séjours en prison et décèdera le 12 décembre 2007 d’une overdose de cocaïne.

Morceaux relatifs : River Deep, Mountain High et Proud Mary.

Plus connu sous leur nom de scène The Mamas & The Papas, le couple Phillips se rencontra au début des années soixante à San Francisco alors que John tournait avec The Journeymen et que Michelle tentait de percer dans le mannequinat. Ils se marièrent en 1962 et déménagèrent à New York City pour monter un groupe avec Cass Eliott et Denny Doherty. De retour en Californie, le quatuor signe California Dreamin’ en 1966 qui laisse présager le flower power de l’année suivante. La formation traverse deux années où les récompenses pleuvent mais disparait logiquement à la fin des sixties avec le mouvement hippie qu’elle incarnait après un dernier essai peu concluant, People Like Us, en 1971. Entre temps, les Phillips ont eu une fille en 1968 pour divorcer l’année suivante, une relation avec le deuxième Papa’s du groupe Denny Doherty étant venue gâcher la fête. Michelle délaissera par la suite la chanson pour des petits rôles au cinéma, ce qui lui vaudra de partager la vie de Jack Nickolson et Dennis Hopper. John Phillips, dont le talent de compositeur lui avait valu la reconnaissance de ses pairs, se vit financer son premier effort solo par Andy Warhol avant de migrer vers Londres où les Stones cette fois-ci tentèrent de lui remettre le pied à l’étrier. Mais miné par ses problèmes d’addiction à l’héroïne (il affirmait lui-même en avoir pris toutes les 15 minutes durant 20 ans), sa carrière solo ne décolla jamais et il décéda d’une crise cardiaque le 18 mars 2001.

Morceaux relatifs : California Dreamin’, Monday Monday.

Le frontman des Stones a empilé les conquêtes (plus de 4000 selon le principal intéressé) durant toute sa vie mouvementée. De ses épouses Bianca Perez à Jerry Hall en passant par ses relations officieuses, de Madonna à Angelina Jolie ou Carla Bruni, Mick Jagger est un coureur de jupons invétéré et incorrigible. Et dans la folie effervescente des sixties, c’est sa relation avec Marianne Faithfull qui sacralisa le mieux le glamour du Swingin’ London. Lorsque Andrew Oldham lui offre son premier titre As Tears Go by, composition Jagger-Richards jugée trop mièvre pour figurer dans le répertoire des Stones, Marianne souffle tout juste ses dix-sept bougies. Fraîchement sortie du couvent St. Joseph, l’angélique Marianne n’a pas encore brûlé ses ailes au souffre Stonien. Keith Richards, qui fut son premier amant, dira « Elle avait encore tout d’une nonne, mais une nonne avec de gros nichons.» Après une brève aventure avec le galeriste John Dunbar qui lui donnera son premier fils Nicholas, Marianne débute son idylle avec Mick Jagger courant 1966. Elle va jouer un rôle déterminant dans l’âge d’or que les Rolling Stones s’apprêtent à débuter, apportant à son compagnon sa culture littéraire étoffée. Le texte de Sympathy for the Devil est librement inspiré du livre The Master & Margarita écrit par Bulgakov, qu’elle fait découvrir à Mick. Ce dernier signe les titres Wild Horses ou You Can’t Always Get What You Want comme déclarations à peine voilées adressées à sa muse. Mais l’acte fondateur de leur union reste l’affaire Redlands qui fit scandale en février 1967. Lors d’une descente de police au domicile de Keith Richards, la police trouve outre quelques grammes de haschisch et tous les invités sous LSD, une Marianne Faithfull en tenue d’Eve déambulant parmi les convives. La presse se déchaîne, certaines feuilles de chou affirmant même que les « bobbies » l’auraient retrouvé Jagger dévorant une barre chocolatée coincée entre ses cuisses. D’autres qu’elle aurait volontairement laissé tomber son manteau de fourrure devant les flics clamant qu’elle n’avait rien à cacher. C’est après avoir vécu avec Brian Jones et Anita Pallenberg que cette dernière l’initia à l’herbe.

Les deux dernières années des sixties sonneront comme une descente aux enfers pour Marianne, qui s’adonne à tout ce qui lui passe sous le nez (et dedans) sans aucune retenue. Elle devient alors son propre personnage de Sister Morphine (qu’elle a écrit et que les Glimmer Twins lui ‘faucheront’ pour le graver sur Sticky Fingers), bascule dans l’addiction et l’anorexie, et n’est plus que l’ombre spectrale de la nymphe charismatique qu’elle était quelques mois auparavant. Sous les projecteurs médiatiques et perpétuellement dans la ligne de mire de la justice, hantés par les fantômes de Brian Jones et Meredith Hunter de la tragédie d’Altamont, les Stones ont nul besoin de se traîner une junkie décatie à leurs côtés. Et sous la pression du groupe et son entourage, Jagger vire Faithfull sans ménagement en 1970 ce qui conduit cette dernière à une tentative de suicide alors qu’elle perd la même année la garde de son fils Nicholas. Durant deux ans, elle erre en guenille dans les faubourgs glauques de Soho comme une clocharde avant que ses proches n’arrivent à la faire entrer dans un centre de désintoxication. Lorsqu’on lui demande son nom, elle dit ne plus se rappeler, n’être qu’un élément de quelques pages dans la dernière biographie des Rolling Stones. Vivre avec Mick Jagger, selon Marianne, c’est à la fois beau et dangereux. On ne sort jamais indemne de marcher à ses côtés.

Morceaux relatifs : As Tears Go by, Sister Morphine.

D’origine allemande mais née à Rome, Anita Pallenberg débute sa carrière dans le mannequinat à Paris après être passée par la Factory Warhol à New-York. Elle prend ensuite quelques cours de médecine et de graphisme avant de s’envoler pour Londres où elle entame une carrière d’actrice (Barbarella, Candy, Vivre à tout prix). Dès son arrivée en 1965 au cœur du Swingin’ London, elle fréquente Brian Jones, l’ange blond guitariste des Stones. Mais ce dernier n’est qu’un tremplin à ses réelles ambitions, atteindre le noyau du groupe, les Glimmer Twins. Et après une relation tumultueuse avec le guitariste en perdition, c’est lors d’une escapade au Maroc qu’Anita se rapproche d’un autre guitariste Keith Richards alors que Jones est de plus en plus violent et sadique avec elle. Débute alors une idylle qui durera une douzaine d’années. Plus d’une décennie où le couple le plus représentatif de la définition même du rock n’aura de cesse de repousser l’extrême limite de la consommation de drogues. Elle va aussi entretenir une forte et durable amitié avec Marianne Faithfull, la compagne de Mick Jagger, même quand ce dernier l’aura éjecté de sa vie. Mais c’est sur les Rolling Stones qu’elle aura le plus grand impact. Souvent considérée comme le sixième membre du groupe, son aura et son influence planeront durant toutes les années soixante-dix. Son avis porte une telle importance que tout l’album Let It Bleed (1969) sera remixé quand elle le qualifiera de merdique. Mick Jagger est tellement subjugué par cette femme au fort caractère et au vocabulaire de docker qu’on leur prête même une liaison sur le tournage de Performance en 1968. Ce qui rendit Richards vert de rage et fou de jalousie, lui inspirant pourtant deux bijoux Gimme Shelter et Let It Bleed.

Le couple Richards-Pallenberg (ils ne se marièrent jamais) eut trois enfants, Marlon, Angela et Tara victime à dix semaines de la mort subite du nourrisson. Les enfants doivent faire avec des parents addicts et une vie à sillonner les routes, suivant les Rolling Stones dans leurs interminables tournées. Quand Keith Richards échappe de justesse à sept ans de prison après son arrestation en 1977 à Toronto pour trafic d’héroïne, il décide de se sevrer lui-même, mais sans Anita qui ne l’entend pas de la même oreille. C’est la première fissure dans le couple qui explose définitivement deux ans plus tard lorsque Scott Cantrell, un gamin de dix-sept ans, est retrouvé mort par balles dans le lit du couple à New York. Le boy s’est suicidé avec un flingue de Keith alors que ce dernier était à Paris avec les Stones pour enregistrer Emotional Rescue. Anita entretenait une liaison avec l’adolescent et est arrêtée pour être finalement blanchie l’année suivante. Elle traîne sa vie de junkie jusqu’au milieu des années quatre-vingt avant de se reprendre en main, passer en désintox et reprendre sa carrière de styliste aux côtés de Vivienne Westwood. Elle décède le 13 juin 2017, des suites d’une hépatite, à l’âge de 73 ans.

Morceaux relatifs : Let It Bleed, Dead Flowers.

Le couple le plus emblématique du rock des années soixante et soixante-dix, le plus médiatique et médiatisé, le plus symbolique et éternel s’avère être celui que forma l’ancien Beatle et l’artiste japonaise. Au fil des siècles l’Histoire nous délivra son lot de couples maudits réels ou fictifs. Il y eut George Sand et Alfred de Musset, Verlaine et Rimbaud, Bonnie Parker et Clyde Barrow comme Adam et Eve, Orphée et Eurydice, Tristan et Iseut ou Hamlet et Ophélie en littérature. Il y aura John et Yoko dans le rock. La veuve noire est souvent accusée à tort ou à raison de la séparation des Beatles, semant son grain de sel dès novembre 1966 quand Lennon fait sa connaissance à l’Indica Gallery où elle expose. Dès lors elle ne le lâche plus, le harcelant au téléphone pour qu’il finance son projet d’un livre sur la musique du XXième siècle, auquel il répondra en lui offrant la partition originale de The Word (Rubber Soul) écrite aux crayons de couleurs. Puis de contribuer à sa nouvelle exposition Half a Wind l’année suivante sous couleur d’anonymat. En mai 1968, alors que son épouse Cynthia est en Grèce, Lennon l’invite à sa résidence de Kenwood où ils consomment leur union après avoir enregistré diverses bandes qui deviendront Unfinished Music No.1 : Two Virgins. La pochette de l’album, qui sort en novembre 1968, fait scandale car elle montre les deux tourtereaux nus de face. Au même moment les Beatles enregistrent leur White Album dans une ambiance tendue et la présence de Yoko en permanence dans les studios Abbey Road n’arrangent rien. Lors des sessions Abbey Road, elle va jusqu’à installer son lit au milieu des branchements sous les yeux médusés des trois autres. Lennon divorce de sa première femme à la même période, alors que les flics, lors d’une descente au Montagu Square, découvrent assez de haschisch pour envoyer le nouveau couple devant les juges (ce qui les empêchera durant des années d’obtenir leur green card aux Etats-Unis). Les deux années suivantes voient John s’éloigner de plus en plus du groupe qu’il a formé pour se radicaliser dans ses engagements politiques. Ils se marient finalement le 20 mars 1969 à Gibraltar avant de décoller en lune de miel à Amsterdam (tout le périple est raconté dans The Ballad of John & Yoko sorti en 45 tours avec les Beatles) où ils débutent leur « bed-in » avant de s’envoler pour Montréal et enregistrer Give Peace a Chance. Devant un parterre de journalistes amusés et intrigués, le couple Ono-Lennon reçoit dans leur chambre d’hôtel, cachés sous leurs draps ou dans un sac, afin de protester contre les guerres et promouvoir la paix mondiale. Ils montent ensemble le Plastic Ono Band qui permet à Yoko de sortir ses deux premiers albums solos avec son mari à la production.

Après avoir déménagé pour New York où ils restent très actifs politiquement, John et Yoko, dont l’union s’était fortement dégradée se séparent en juillet 1973. Lennon part vivre à Los Angeles avec son assistante May Pang dans ce qui deviendra « The Lost Weekend ». Un weekend qui durera plus d’un an. De son côté, Yoko continue sa vie d’artiste et multiplie les voyages au Japon pour ses expositions. Elle autorise son mari à revenir au Dakota Building lorsqu’elle sent que ce dernier est en train de s’éloigner définitivement (May Pang et lui songeaient à acheter une maison) et donne ensuite naissance en 1975 à leur seul fils Sean Ono Lennon. Le couple se coupe alors du monde extérieur, retranché au septième étage de leur immeuble austère comme dans un bunker. Ils réapparaissent aux yeux du monde quelques mois avant l’assassinat de John alors qu’il vient de publier son premier album en six années.

Après la mort de son mari, Yoko Ono va devenir l’héritière légale de toute l’entreprise Lennon, ce qui implique les Beatles. Les trois autres devront traiter directement avec elle pour tout ce qui concerne le marketing démentiel autour du groupe ainsi que les rééditions ou autres coffrets. Elle continue pour autant sa carrière d’artiste en capitalisant ouvertement sur le nom de feu son époux, parfois à la limite du décent comme quand elle met en vente les fameuses lunettes rondes que John portait le soir de sa mort. Soulevant la rancœur de la moitié du monde pour son rôle supposé dans la séparation des Beatles, en froid avec les trois autres membres et Julian Lennon qui l’attaquera en justice pour avoir été déshérité, Yoko Ono fut rarement élue personnalité préférée du showbiz. Elle reste néanmoins une icône incontournable dans la vie de Lennon et des Beatles. McCartney reconnaîtra même qu’elle a joué un rôle considérable dans la productivité et la créativité de son ancien ami dans la deuxième moitié de sa vie.

Morceaux relatifs : Happiness is a Warm Gun, I Want You (She’s So Heavy), Jealous Guy et Oh Yoko!

Sir Paul fut pendant des années promis à sa muse Jane Asher, qui lui inspira ses plus grands titres de la première ère Beatles (Yesterday, All My Loving, You Won’t See Me ou I’m Looking Through You) et chez les parents de qui il logea jusqu’en 1966. Mais leurs fiançailles tombèrent à l’eau lorsque, rentrée de Bristol à Londres plus tôt que prévu à l’été 1968, Jane surprit Macca au lit avec Francie Schwartz une scénariste américaine. C’est donc à la surprise générale que le 12 mars 1969, le dernier Beatle célibataire et le plus convoité, épousa Linda Eastman une photographe américaine. Les deux artistes se rencontrèrent pour la première fois en mai 1967, alors que Linda couvrait la première de Sgt. Pepper’s à Londres. Habituée des groupes de rock, elle immortalisa Hendrix, les Doors, Aretha Franklin ou encore Bob Dylan. Ils se retrouvent un an plus tard lors de l’inauguration d’Apple Records à New York et McCartney ne se fait pas attendre pour l’inviter à Londres. Une « Apple Scruf », les groupies des Beatles qui campaient devant leurs domiciles nuit et jour, raconte que le soir où Linda arriva à St. John’s Wood, un Paul béat joua Blackbird (encore inédit) à la fenêtre pour les fans siégeant dans la rue.

A l’instar de Yoko Ono, Linda McCartney va jouer un rôle crucial dans la carrière de son mari. C’est elle qui lui souffle à l’oreille l’idée de son père et de son frère (John & Lee Eastman) comme nouveau manager des Beatles quand les trois autres préfèrent se tourner vers Allen Klein. Suite aux tensions et disputes précédant l’implosion du groupe, retiré dans une ferme écossaise, Macca sombre dans une forte dépression et se réfugie dans l’alcool. Elle va lui remettre le pied à l’étrier, le poussant à reprendre l’écriture et la composition ce qui donnera les albums McCartney et RAM. Le goût à la musique retrouvé, Paul est désireux de reprendre les tournées délaissées par les dernières années des Beatles et monte un nouveau groupe, Wings. Il apprend quelques notes de piano à Linda qui intègre la formation avec Denny Laine des Moody Blues. Dix années durant, Wings enchaîne les albums et tournées mondiales, ce qui n’empêche pas McCartney de rejouer ses anciens hits des Beatles. Lorsqu’il reprend sa carrière solo dans les années quatre-vingt, Linda est toujours à ses côtés dans ses activités musicales.

En parallèle, elle lui donne trois enfants (Mary, Stella et James) en plus de Heather issue d’une première union mais que McCartney adoptera légalement. Linda va aussi influencer durablement le mode de vie de son époux, le convertissant au végétarisme et le sensibilisant à la défense des animaux. Des causes qu’il continuera à défendre après le décès de sa femme le 17 avril 1998 d’un cancer du sein, diagnostiqué deux années plus tôt.

Morceaux relatifs : Maybe I’m Amazed, The Lovely Linda, Two of Us.

C’est un jeune mannequin de tout juste vingt printemps qui, apparaissant pour la première fois dans le film A Hard Day’s Night des Beatles, va faire tomber à ses pieds plus d’un guitariste du Swingin‘ London. Pattie Boyd tape de suite dans l’œil de George Harrison qui s’empresse de la rencarder durant le tournage, au printemps 1964. L’année suivante, elle fait partie avec George, John et Cynthia Lennon, des premiers Beatles à prendre du LSD, glissé dans leur café à leur insu par John Riley un ami dentiste (souvent considéré à demi raison comme le Dr. Robert de Revolver). George et Pattie emménagent à Kinfauns, une villa-bungalow située dans le Surrey, où ils resteront jusqu’en 1970. Le couple se marie le 21 janvier 1966 avec Paul McCartney (le seul Beatle présent) comme témoin. Ils partent ensuite en lune de miel à la Barbade avant de s’envoler au mois de septembre pour Bombay et rejoindre le virtuose du sitar Ravi Shankar. Elle développe alors un fort intérêt pour le mysticisme hindou auquel elle initie son jeune mari. C’est elle qui insiste auprès des quatre Beatles pour se rendre le 24 août 1967 à la conférence du Maharishi Mahesh Yogi qui débouche sur un séminaire à Bangor au Pays de Galles (où ils apprennent la mort de Brian Epstein). En février 1968, les Beatles et leurs conjointes, accompagnés de Mike Love, Donovan et des sœurs Farrow entre autres, partent pour l’ashram du Maharishi à Rishikesh en Inde. Alors que les Beatles sont en instance de divorce, les Harrison déménagent en 1970 à Friar Park, un manoir victorien situé à Oxfordshire et visible dans les clips de Something ou sur la pochette de All Things Must Pass.

La même année, Eric Clapton sort avec son groupe Derek & The Dominos son album Layla & Other Assorted Love Songs, éloge non dissimulé à son amour pour Pattie. Slowhand était pourtant un ami proche de Harrison depuis pas mal d’années, rare musicien extérieur ayant été invité sur un album des Beatles (While My Guitar Gently Weeps). Mais c’est d’abord par la couche de Ron Wood des Faces que Pattie passera, lasse des infidélités de son mari (qui coucha même avec Maureen Starkey la femme de son ami Ringo Starr) et de ses excès d’alcool et cocaïne. Le couple se sépare en 1974 et le divorce est finalement prononcé en juin 1977. Elle est alors libre de trouver refuge dans les bras de Clapton, qui s’était vu refuser ses avances en 1970 le poussant à s’isoler trois années durant dans sa résidence du Surrey et le laissant alcoolique et héroïnomane. C’est d’ailleurs Pete Townshend qui le sortira de son addiction, organisant pour lui un come-back au Rainbow Theatre de Londres en 1973 et lui offrant le rôle du prêtre dans le film Tommy de Ken Russel en 1975 (il y interprète Eyesight to the Blind). Il épouse Pattie Boyd en 1979 après cinq ans de vie commune mais comme son ami et prédécesseur, ses problèmes d’infidélité et d’addiction plombent son mariage. Lorsque Boyd apprend qu’il a eu un enfant illégitime avec l’actrice italienne Lory Del Santo (Connor voit le jour en 1986 et se tuera à quatre ans en chutant accidentellement du 53ème étage d’un appartement à Manhattan, inspirant à Clapton la chanson Tears in Heaven), elle demande le divorce et fait ses valises en avril 1987. De 2005 à 2008, elle dévoila mondialement les photos privées de ses anciens époux dans ses expositions Through the Eye of a Muse et Yesterday & Today : The Beatles & Clapton. Le 29 avril 2015, elle se marie pour la troisième fois à 71 ans au promoteur immobilier Rod Weston qui partage sa vie depuis 25 ans.

Morceaux relatifs : Something, Layla, Wonderful Tonight et Bell Bottom Blues.

Encore membre du groupe éphémère Les Roche Martin, Véronique Sanson fait la connaissance de Michel Berger en 1967, alors directeur artistique chez Pathé-Marconi. Rencontre déterminante pour la chanson française, qui marque le début d’une collaboration fructueuse. Après la sortie de son premier 45 tours, Le printemps est là en 1969, il faut attendre deux années supplémentaires et sa signature sur le nouveau major du disque Warner-Elektra-Atlantic (première artiste française du label) pour voir son premier album Amoureuse, entièrement produit par Berger devenu son compagnon. Porté par le titre éponyme et Besoin de personne, l’album qui est entièrement écrit et composé par Sanson rencontre un franc succès. Elle assure alors les premières parties de Michel Polnareff, Claude François et Julien Clerc. Il est rapidement suivi par un second essai, De l’autre côté de mon rêve, sorti en décembre 1972 et comportant le single Chanson sur ma drôle de vie. C’est durant le mixage du disque que Véronique Sanson, qui vient de faire la rencontre de Stephens Stills de passage dans la capitale avec son groupe Manassas, prétexte auprès de Michel Berger aller acheter des cigarettes. Il ne la reverra plus. Tombée sous le charme de l’américain, elle s’envole avec lui aux Etats-Unis pour l’épouser (par politesse affirmera-t-elle quelques années plus tard). Berger lui ne s’en remettra jamais. Son premier album, souvent intitulé Cœur brisé (rien d’anodin) à cause de sa pochette où apparait un cœur rouge brisé par un point d’interrogation, recèle une multitude de titres destinés à son ex-muse. L’album complet même : Si tu t’en vas, Oublie moi de sitôt, Ce que la pop music a fait d’une petite fille, Je trouverai autre chose, Je t’aime vachement fort… Même le titre Message personnel qu’il compose pour Françoise Hardy cette même année 1973 sonne comme une déclaration désespérée à son ancienne compagne. C’est avec France Gall qu’il retrouvera goût à la vie et formera un deuxième tandem artistique qui marquera la chanson française.

Quand à Véronique Sanson, elle donne naissance à son premier fils Christopher Stills l’année suivante. Son exil outre-Atlantique lui apporte énormément sur le plan musical, enregistrant avec les musiciens de Stephen Stills, elle sort l’album très rock Le Maudit, encensé par la critique. Mais son mariage bat rapidement de l’aile, son conjoint alcoolique et violent lui faisant vivre un enfer. Ils finissent par se séparer en 1976 et divorcer trois ans plus tard avant une bataille juridique tenace pour la garde de leur fils. Elle reconnaîtra des années plus tard avoir même songé à engager un tueur à gages (pour seulement 8.000 dollars) afin de se débarrasser du père de son enfant. Depuis, l’eau a coulé sous les ponts et les deux musiciens se sont réconciliés. Véronique Sanson partage désormais la vie de Christian Meilland, un promoteur immobilier.

Morceaux relatifs : To Mama from Christopher & The Old Man, My Angel.

Après avoir quitté l’école à dix-sept ans, le jeune John McVie était percepteur (Taxman comme le chantaient les Beatles) avant de rejoindre les Bluesbreakers que venait de former John Mayall. Ce dernier reçut son numéro de téléphone par Cliff Barton du Cyril Davies All Stars à qui il pensait initialement. McVie se vit offrir la basse dans la formation originelle des Bluesbreakers, et apprit à jouer le blues sous la tutelle de Mayall qui lui fit découvrir les disques de B.B. King et Willie Dixon. Après le passage éclair de Clapton en 1966 qui ne grava qu’un seul LP avec le groupe (Bluesbreakers with Eric Clapton, la pochette à la bande dessinée), Mayall débauche le jeune Peter Green pour le remplacer. Peu après, c’est le batteur Aynsley Dunbar (un temps convoité par Hendrix) qui met les voiles et cède sa place à Mick Fleetwood. Les trois développent alors une forte amitié et se mettent souvent à jammer dans le dos de John Mayall. Quand Peter Green laisse sa place au jeune virtuose Mick Taylor au printemps 1967, il ne part pas seul et emmène avec lui les deux larrons. Il forme alors Fleetwood Mac par contraction des noms de sa section rythmique. Ils sont rejoint par le pianiste et guitariste-slide Jeremy Spencer. Ensemble ils gravent leur premier LP Peter Green’s Fleetwood Mac qui contient outre des compositions de Peter Green, des standards du blues signés Elmore James ou Robert Johnson. L’album fait un carton en Grande-Bretagne, établissant Fleetwood Mac dans le circuit comme une valeur sûre du British Blues.

John McVie se marie la même année à la pianiste Christine Perfect avec Peter Green comme témoin. Cette dernière avait souvent été conviée par Fleetwood Mac en tant que musicienne de studio sur différentes sessions. Elle avait rejoint dès 1968 le groupe de blues de Stan Webb Chicken Shack avec qui elle enregistra deux albums (40 Blue Fingers, Freshly Packed & Ready to Serve et O.K. Ken?) et un hit I’d Rather Go Blind. Perfect reçut deux années consécutives en 1968 et 1969 le prix de meilleure artiste vocale par le prestigieux Melody Maker. Elle rejoint officiellement Fleetwood Mac à partir de Future Games en 1971.

En 1974, le groupe part vivre chez John Mayall à Los Angeles profiter d’un break. Alors qu’ils recrutent Nicks et Buckingham pour débuter le tournant décisif de leur carrière, les McVie traversent des temps difficiles. John se met à boire conséquemment, poussant Christine à réagir tout d’abord dans ses compositions (Say You Love Me, Over My Head) sur Fleetwood Mac en 1975 puis en demandant finalement le divorce l’année suivante durant l’enregistrement de Rumours. Ses contributions sur le plus grand succès commercial de Fleetwood Mac sont d’ailleurs toutes en rapport avec son mariage vacillant. Elle sera par la suite en couple avec Dennis Wilson, le batteur des Beach Boys durant trois années et se séparèrent peu avant sa mort par noyade en 1983. Sa rupture avec McVie ne déteignit jamais sur l’osmose du groupe et il fallut attendre 1998 avant que Christine ne claque la porte, fatiguée des tournées incessantes et souffrant du mal du pays. Elle retourna vivre en Angleterre et se retira de la vie musicale durant plus de quinze ans avant de revenir officiellement au sein de Fleetwood Mac en 2014.

Morceaux relatifs : Don’t Stop, You Make Loving Fun.

Alors bassiste au sein de la formation rock psychédélique Fritz, Lindsey Buckingham fait la rencontre, à la fin des sixties, de Stevie Nicks qui devient rapidement la chanteuse du groupe. Ensemble, ils se produisent dans la baie de San Francisco et ouvrent notamment pour Jimi Hendrix et Janis Joplin. Après la dissolution de Fritz en 1972, devenus amants, le couple couche ses propres démos sur l’album Buckingham/Nicks sorti l’année suivante. Ce dernier ne rencontre que peu de succès (même si Buckingham démontre tout son talent de guitariste, notamment sur Frozen Love qui donne un avant-goût du jeu qu’il apportera à Fleewtood Mac) mais tombe dans les oreilles de Mick Fleetwood, alors en villégiature chez John Mayall à Los Angeles. A la recherche d’un second souffle à son groupe Fleetwood Mac, il invite le tandem qui est alors endetté et qui cumule les petits boulots, à les rejoindre ce qu’ils acceptent de suite. Les compositions de Buckingham et Nicks vont apporter les sonorités du rock californien à la formation anglaise qui débutera alors sa période américaine.

Ils sortent l’éponyme Fleetwood Mac en 1975, porté par les titres de Stevie Nicks Rihannon, Crystal et Landslide ainsi que ceux de Christine McVie Warm Ways et Say You Love Me. Le LP est propulsé au sommet des charts américains et se vendra au fil des années à 17 millions d’exemplaires. Mais c’est Rumours en 1977 qui va exploser tous les compteurs et devenir l’un des albums les plus vendus de l’histoire (plus de 35 millions). Buckingham et Nicks signent leurs meilleurs titres avec Go Your Own Way, Dreams ou Gold Dust Woman. Cette même année signe la fin de leur romance, Stevie Nicks ayant une brève relation avec le batteur Fleetwood. Après une aventure avec le batteur/chanteur des Eagles Don Henley, c’est avec le guitariste du même groupe Joe Walsh qu’elle vivra au début des années 80. Buckingham se mariera en 1998 avec Kristen Messner, de 21 ans sa cadette, avec qui il aura trois enfants.

Morceaux relatifs : Crystal, Landslide.

Couple maudit par excellence, le poète qu’était Jim Morrison avant de sacraliser l’essence même de la rock star planétaire, trouva en Pamela Courson son âme sœur destructrice, son alter-ego, son reflet du sexe opposé. Le terme muse trouve ici son écho le plus cristallin et retentissant tant Pam inspira le Roi Lézard durant sa courte carrière au sein des Doors. Il semble ardu de ne pas sentir flotter son spectre à l’écoute des textes écorchés de Morrison traitant des thèmes de l’amour ou de la romance perdue. Son recueil de poésie The New Creatures, paru en 1969, lui est d’ailleurs entièrement dédié. Les deux âmes torturées se rencontrèrent pour la première fois en 1965 au London Fog (club désormais disparu situé face au Whisky-A-Go-Go) où les Doors se produisaient, Courson alors étudiante en art au Los Angeles City College. Tout au long de leur fusionnelle relation, ils ne cesseront pourtant jamais de se déchirer, s’écorcher et se mettre à nus pour toujours se réconcilier. Leurs nombreuses infidélités respectives auront sans aucun doute joué un rôle non négligeable dans les tensions récurrentes du couple. Outre les noms clinquants de Nico, l’égérie du Velvet ou de Grace Slick du Jefferson Airplane, ainsi que les nombreuses groupies comme Pamela Des Barres, Morrison vécut une idylle enflammée avec la journaliste rock Patricia Kennealy. Ils débutèrent une liaison après s’être rencontrés en 1969 lors d’une interview. Très portée sur le spiritisme, elle l’initia aux rites occultes ce qui intriguait beaucoup le côté shaman de Morrison. C’est d’ailleurs la seule femme avec laquelle il s’unira, de façon certes très officieuse lors d’un mariage pagano-celtique en juin 1970. Aucun document d’état pour attester cette union, mais Patricia prendra plus tard Morrison comme second nom. Durant leur correspondance épistolaire, Jim s’adressera toujours à elle comme « Madame Morrison » ou « Ma femme ». Leur relation se dégrade quand elle lui apprend qu’elle est enceinte de lui, la poussant à ne pas garder l‘enfant. Il correspondra avec elle jusqu'à sa mort, lui faisant la promesse qu'il l'épousera à son retour de France prévu pour l'automne, se justifiant d'avoir accompagné Pam pour une rupture en douceur. Patricia passera aux aveux des années plus tard, certifiant que Courson a tué Morrison en l'entraînant vers le fond de son héroïmanie. Ils auraient cassé quelques jours avant sa mort, selon les confessions de Max Fink l'avocat de Morrison. Mais ce dernier a désormais disparu et personne n'a jamais publié son rapport.

Morrison finit donc toujours par revenir auprès de Pam et quand cette dernière s’envole pour Paris en janvier 1971, il la rejoint deux mois plus tard, en partie sur conseil de son avocat suite au procès de Miami. Pas d'extradition possible entre la France et les États-Unis à l'époque. Il se met alors au vert sur la dope, sans pour autant lâcher le verre, jouissant du parfait anonymat que lui confère la cité lumière. Courson fréquentait depuis quelques mois le comte Jean de Breteuil, junkie artisto et dealer pour tout le gratin du showbiz. Marianne Faithfull lui collera d’ailleurs sur le dos la mort de tous les rockers de l’époque, de Brian Jones à Jimi Hendrix en passant par Janis Joplin (il aurait été aperçu sur le parking de son motel le soir de sa mort). Elle avait fait sa rencontre du temps des Stones, Keith Richards étant son meilleur client, et avait partagé sa vie à Paris. Le soir de sa mort, après un coup de téléphone il quitte l’appartement précipitamment. Lorsqu’il revient, paniqué, il ordonne à Faithfull de faire ses valises et les deux s’envolent le jour même pour le Maroc où sa famille jouit d’un droit diplomatique. Elle se souviendra : « Jean est revenu et il m’a tabassé. Il était tellement furieux qu’il aurait sans doute reconnu lui-même avoir dépassé les bornes abominables qu’il respectait jusque-là. Il m’a littéralement traîné en grande hâte chez sa mère à Marrakech. Il voulait oublier les sinistres évènements qui venaient de se produire. De toute évidence, c’était pour lui une très grave affaire que d’avoir tué Jim Morrison, comme il le disait. » Rattrapé par ses propres démons, il meurt en juin 1972 des suites d’une overdose.

Malgré les déclarations de Pamela Courson à la police parisienne, le corps de Jim a vraisemblablement été déplacé du Rock ‘n’ Roll Circus, le bar jet-set de Samuel Bernett fréquenté par Mick Jagger, Johnny Halliday ou Roman Polanski, à son appartement rue Beautreillis. Les gros bras du club ainsi que les dealers comme De Breteuil ou un certain ‘Le Chinois’, en contact avec la French Connection marseillaise dont il écoulait la came venue de Hong Kong (surnommée China White pour son taux de pureté atteignant les 80%) auraient alors dicté à Pamela la démarche à suivre et les propos à tenir. Après la cérémonie rapide et en petit comité au Père Lachaise, elle repart vivre à Los Angeles. Elle entame alors une bataille juridique avec les trois autres membres des Doors ainsi que les parents de Morrison, ce dernier l’avait en effet déclaré sa seule héritière. Elle meurt d’une overdose le 22 avril 1974, sur le canapé de l’appartement qu’elle partageait avec deux junkies, trois ans après Jim et à 27 ans elle aussi. Ses parents songèrent un temps à la faire enterrer au Père-Lachaise, auprès de son grand amour, mais face aux difficultés qu’entraînait le transport du corps, ils renoncèrent très vite. Elle est finalement incinérée, son urne reposant au Memorial Park de Santa Ana. Sa plaque commémorative indique Pamela Susan Morrison, malgré qu’ils ne fussent jamais mariés.

A Paris, Jim Morrison fréquente la réalisatrice Agnès Varda et le photographe Alain Rosnay. Le cliché ci-dessus est tiré d’une suite de photos prises le 28 juin 1971, soit cinq jours avant sa disparition.

Morceaux relatifs : Love Street, You’re Lost Little Girl, The Spy, Indian Summer.

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