C’est un petit ruisseau issu de son grand frère Rock qui avec le temps a grossi pour sortir de son lit et devenir le courant fleuve des décennies qui suivirent les sixties. Pour atteindre des paroxysmes de popularité au crépuscule des années quatre-vingt avec des groupes comme Bon Jovi, Scorpions ou Guns ‘n’ Roses. La caste hard rock s’élargit alors comme jadis son aîné et sert vulgairement à désigner des genres comme le metal, le heavy ou même le grunge qui parviendra plus tard à s’émanciper lui-aussi. Les pionniers se nomment Led Zeppelin, Black Sabbath ou Deep Purple et ont la particularité commune, outre la nationalité anglaise, de puiser leur inspiration dans le blues et le rock ‘n’ roll des débuts. Saupoudrées de longues improvisations saturées venues elles du rock psychédélique et progressif comme Pink Floyd, Genesis ou Emerson Lake & Palmer, leurs compositions grasses et parfois sales (qui elles proviennent du rock garage comme les Kinks) reposent sur une saturation volontaire des morceaux ainsi qu’une amplification exagérée. L’éclectisme des sujets abordés permettent à des thèmes encore peu abordés dans le rock comme la science-fiction ou la fantasy d’être exposés au grand public. Cet univers particulier va rejaillir inéluctablement sur le visuel de tous ces groupes émergents pour se retrouver en premier lieu sur les pochettes de leurs albums. Parfois fantastiques, morbides, oniriques, glauques ou humoristiques, ces LP témoignent d’un univers nouveau qui s’ouvre aux yeux et surtout aux oreilles de son public.
Le premier enregistrement du quatuor de Birmingham voit le jour en 1970, deux ans après sa formation. Black Sabbath tire son nom d’un film d’horreur italien de série B sorti en 1963. Ce disque va littéralement ouvrir les portes à un nouveau genre qui influencera une quantité phénoménale de groupes comme Iron Maiden, Slayer ou Korn. Le groupe cultive dès ses débuts une réputation sulfureuse, accentuée par cette fascination de l’occulte qui leur attirera bien des problèmes. Et des légendes urbaines rondement fomentées qui participent au folklore entourant Black Sabbath. La pochette de leur premier LP, prise à l’historique roue hydraulique de Mapledurham située sur les bords de la Tamise dans l’Oxfordshire, représente une femme à l’allure inquiétante vêtue de noir. Si le nom du modèle a disparu des mémoires, il n’en fallait guère peu pour que court la rumeur qu’elle n’était pas présente lors du cliché et que le spectre aurait fait son apparition lors du développement de la photo ! Pour enfoncer le clou, l’album sort un… vendredi 13 (février 1970). La joyeuse bande menée par Ozzy Osbourne cultivera les scandales durant toute la décennie avant que ce genre d’éclats devienne monnaie courante dans ce qui est désormais devenue la musique metal.
La formation de Hertford a longtemps ramé avant d’atteindre le succès planétaire qu’on lui connait. Les auteurs du titre légendaire Smoke on the Water, dont le riff est aussi célèbre que celui de Satisfaction, ont déjà de la bouteille lorsque leur quatrième LP In Rock sort en 1970. Deep Purple est alors une valeur sûre et grandissante du hard rock au même rang que Led Zeppelin. Mais des tensions grandissantes au sein du groupe, et des problèmes d’addiction multiples vont plomber la carlingue en plein vol et le quintet explose en pleine gloire en 1976 à la consternation générale. Chacun part mener sa carrière solo avec plus ou moins de succès (le bassiste Roger Glover sortira le concept album d’opera rock Butterfly Ball emmené par le hit Love is All) Il faudra attendre presque dix ans avant une reformation complète qui écume les scènes du monde entier depuis plus de trente ans.
Tristement sous-estimé et cyniquement catalogué « Pink Floyd du pauvre », Hawkwind peut quand même se vanter d’avoir enfanté Lemmy Kilmister de Motörhead ou d’avoir compté dans ses rangs Ginger Baker de Cream. Porté par le charisme sans unanimité de Dave Brock et miné par un line-up très instable, la formation londonienne restera éternellement dans l’ombre de ses illustres aînés. Il reste néanmoins quelques pépites comme In Search of Space ou Hall of the Mountain Grill, des classiques indémodables de space et progressive rock.
Fortement inspirée par Deep Purple et Led Zeppelin mais bien évidemment Black Sabbath, la formation issue de l’est londonien prend forme autour du bassiste Steve Harris et du guitariste Dave Murray. Il faudra cinq années de maturation avant la sortie du premier opus éponyme en 1980. Mais la consommation industrielle de cocaïne du chanteur Paul Di’Anno pousse les autres membres à l’évincer dès le deuxième album l’année suivante, alors que ses performances scéniques devenaient de plus en plus pitoyables. C’est Bruce Dickinson, fort de son passage au Reading Festival avec son groupe Samson, qui le remplacera dès le troisième album The Number of the Beast, numéro un au Royaume-Uni. La décennie quatre-vingt consacre définitivement Iron Maiden comme nouvel étendard du heavy metal, ouvrant la voie à Metallica, Slayer ou Avenged Sevenfold. L’image du groupe est aussi indissociable de sa mascotte « Eddie the head », apparaissant sur chaque pochette d’album.
Sources :
Dominique Dupuis – Rock Vinyls ; Histoire subjective du rock à travers 50 ans de pochettes de vinyles (2010) Éditions Stéphane Bachès
Dominique Dupuis – Hard Rock Vinyls (2016) Du Layeur Éditions